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Quand le coeur n'y est plus

MONTJOIE, JANVIER 2014

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C'est le jour de la grande messe pour Marc et ses collègues technico-commerciaux de l'entreprise Brindépi. Le patron les a convoqués tous les dix pour une réunion inhabituelle. Les résultats de la dernière moisson ne sont pas très enthousiasmants et le moral est quelque peu en berne sur le terrain et dans la société. Aussi, Roland, le dirigeant, veut relancer la machine avant le printemps et les tours de plaine qui vont reprendre dans quelque temps.

« Bon, les gars, il ne s'agit pas de déconner dans les semaines qui viennent. Nos concurrents sont aussi aux aguets, les agriculteurs sont à cran comme vous le savez mieux que moi. » Tous écoutent, l'air soucieux. Même Franck qui a toujours le mot pour rire, ne décoince pas en ce matin aux allures exceptionnelles. Puis, Roland sort des chiffres et des objectifs. Les TC se regardent l'air dépité, pensant tous que leur patron met encore la barre bien haut vu le contexte actuel.

Un peu plus tard, Marc se retrouve avec le boss dans son bureau. Ses quinze ans de boutique lui donnent de l'aplomb. Aussi, c'est sans hésiter qu'il fait remarquer que « deux ou trois produits de la gamme ne vont pas faire l'affaire dans ma zone. Des agriculteurs ont été déçus ces deux dernières années. Dommage que tu n'aies pas rajouté celui que je t'avais demandé. Tes nouveaux objectifs vont être difficiles à atteindre. »

Haussant les épaules, son dirigeant rétorque tout en soulevant deux ou trois piles de dossiers : « Ces produits m'amènent de la marge. Et ils ne passent pas si mal que cela. Tu as à faire à deux ou trois casse-bonbons qui râlent toujours sur tout. Même les concurrents n'en veulent plus. » Faisant la moue, Marc observe que « ce n'est pas une raison et je n'ai pas pour habitude de vendre un produit qui ne convient pas à mon client ».

En sortant du bureau de son patron, il rencontre Franck qui lui murmure : « Ne t'en fais pas, fais ton job et remplis-lui ses lignes d'objectif. » Las, Marc quitte l'entreprise pour retrouver sa petite famille. Il a perdu de son allant et en perdrait presque le plaisir de se lever le matin. « Allez mon vieux, tu ne vas pas te laisser bouffer par quelques mauvais coucheurs », tente-t-il de se rassurer. Mais, ce soir, il se sent bien seul.

Hélène Laurandel

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